Le soutien psychosocial, prérequis à la résilience pour les PDI de Bamako
La récurrence des attaques terroristes et les tensions intercommunautaires dans le Nord et le Centre du Mali, entrainent depuis 2012 des déplacements massifs de populations vers des lieux plus sûrs, notamment la capitale Bamako. En 2021, le bureau de coordination des affaires humanitaires au Mali estime à environ 311.000, le nombre de personnes déplacées internes (PDI) dans le besoin. Cet afflux important de personnes vers le Sud du pays impacte considérablement la démographie, et par conséquent pèse de tout son poids sur les services sociaux de base qui étaient déjà insuffisants. Notons qu’en plus de l’instabilité sécuritaire à laquelle le Mali fait face, il faut aussi compter avec les chocs de l’insécurité alimentaire et des inondations qui contribuent fortement à exacerber la situation de vulnérabilité des PDI et de la population en général. Dans la capitale Bamako, les PDI ont trouvé refuge pour certains au sein des familles d’accueil, et pour d’autres sur les sites de déplacés et des points de regroupements où les conditions de vie sont extrêmement difficiles.
Dans un point de regroupement de PDI que nous avons visité au quartier Faladié, ce sont environ 130 ménages qui vivent dans des abris de fortune depuis 2 ans. À majorité Peulh, ils viennent du centre du pays, plus précisément du cercle de Bankass. L’attaque meurtrière d’Ogassagou en mars 2019 ayant fait 134 morts, serait l’évènement déclencheur de leur fuite. Depuis lors, ils vivent dans des conditions extrêmement difficiles, qui accroissent considérablement leur vulnérabilité. Sur ce point de regroupement, les derniers signes du passage d’acteurs humanitaires remontent à plus de 10 mois dans le cadre d’actions liées au COVID-19. La communauté arrive difficilement elle-même à se prendre en charge. En effet, les environs du point de regroupement sont jonchés d’ordures et le passage de la pluie qui laisse de nombreux points d’eau stagnante favorise la survenue de nombreuses maladies chez les enfants et les personnes âgées, qui constituent une grande partie de la population qui reste en permanence sur ce site. Les populations survivent au jour le jour et ont pour principale activité la fouille des ordures et le recyclage pour la revente, pour leur propre utilisation et consommation. Elles s’exposent ainsi à de nombreux risques.
La malnutrition est omniprésente sur ce site et les populations semblent s’être malheureusement accommodées à ces conditions de vie, n’ayant pas d’autres options.
L’accès aux services sociaux de base est un défi pour ces PDI qui arrivent à peine à se nourrir. Le manque de moyens financiers et les problèmes de documents d’identité représentent les principaux obstacles qui s’érigent face à elles. De ce fait, en cas de maladie, elles ont recours pour la majorité d’entre elles aux soins traditionnels. Aucun enfant de ce point de rassemblement de PDI n’est scolarisé, faute de moyens financiers.
Continuer à vivre est un véritable défi pour ces personnes qui ont tout perdu en fuyant l’insécurité de leurs villes et villages du centre du pays afin de trouver refuge à Bamako. Alors que la majorité des ressources mobilisées par la communauté humanitaire est affectée aux zones Nord et Centre en raison bien évidente de la priorisation et de la sévérité des effets de la crise, les PDI sur site à Bamako peinent à faire montre de leur résilience face à la dureté de la vie. D’une analyse immédiate, l’accompagnement psychosocial, et le soutien à l’autonomisation serait le gap à combler si l’on souhaite voir des PDI plus résilients. En effet, les traumatismes subis par ces populations rendues vulnérables du fait du terrorisme et des conflits intercommunautaires sont rarement évoqués.
Force est de reconnaitre que des personnes moralement affaiblies, et totalement limitées dans la satisfaction des besoins vitaux seront difficilement aptes à reprendre une vie normale si un soutien psychosocial conséquent et un encadrement à l’autonomisation ne leur sont pas octroyés.